Les habitants du Qatar font le frais d’une justice dépassée par les événements. La gestion des dossiers des justiciables n’est quasiment pas informatisée. Ce sont plusieurs versions papier dans des endroits différents avec des fonctionnaires qui ne se parlent pas entre eux.
Mais ou est passé mon dossier ?
C’est la question que bon nombre de justiciables se posent lorsqu’ils essaient de contacter la justice qatarie pour savoir quand et comment ils passeront en justice. En fait le dossier est initié par la police et ensuite conservé en deux endroits différents de Doha dans des archives papiers. D’immenses couloirs organisés comme il y a 100 ans sont les lieux où sont stockés les dossiers des justiciables. De temps en temps sur un vieil ordinateur, quelques personnels saisissent des dossiers. Ce qui permet d’en retrouver un certain nombre. Voilà pourquoi au tribunal le juge n’ouvre pas « le dossier » car il sait qu’il est incomplet. C’est d’une telle opacité, que des dossiers disparaissent et des justiciables attendent une hypothétique décision de la justice.
Augmenter les salaires des juges pour qu’ils restent au Qatar est ce suffisant ?
Afin de renforcer le système judiciaire et le rendre plus attrayant aux qatari, les indemnités touchant le logement, la formation, les déplacements et autres ont été augmentées de 120 %. Elles représentent dans un salaire moyen environ 60 %.
Le ministre de la Justice du Qatar a salué la décision, affirmant que l’Emir renforçait la primauté du droit en consolidant l’indépendance de la justice. Cette augmentation réduit les « pressions de la vie » et permet au personnel judiciaire de se concentrer sur les affaires en charge. Cette forte augmentation devrait aussi faciliter quelques vocations parmi les Qatariens, le nombre de personnels en charge de ce secteur n’a pas suivi l’augmentation de la population. A ce jour l’essentiel de la population judiciaire est étrangère au pays et sous contrat à durée déterminée.
Actuellement les magistrats qui rendent la justice au Qatar sont essentiellement des soudanais, marocains, palestiniens égyptiens ou syriens qui ont une carte de séjour à renouveler régulièrement. Ils ont une pression forte car ils peuvent être remerciés à tout moment.
Renforcer l’indépendance des juges
Selon l’article 131 de la Constitution du Qatar : «Les juges sont indépendants et ne sont soumis dans leur décision à aucune autre autorité que celle de la loi.» Le fait qu’une partie importante du personnel judiciaire soit composée de non nationaux sous contrat, engendre une précarité ne leur permettant pas d’exercer leur fonction de manière sereine et en toute indépendance et pourrait constituer une limite au principe de l’inamovibilité du juge.
La justice qatarie n’est pas à sa première grosse erreur. L’image qu’elle donne fait voler en éclat des années de travail et montre au monde entier qu’à tous les niveaux la justice du Qatar manque de rigueur et de sérieux. Le représentant de l’état le procureur général dans l’affaire dite des 4 français s’est totalement discrédité. Comme il s’est discrédité en intervenant dans l’affaire des deux proviseurs des lycées français au Qatar. On le dit homme intelligent et subtil dans ces deux affaires ce ne fut pas le cas.
Pour le Qatar la justice doit devenir une priorité et ne pas être traitée par les autorités qataries uniquement à coups d’augmentations de salaires ou indemnités. Elle doit avoir les moyens de ses ambitions et moderniser sa façon de travailler, ce qui me fait dire que le Qatar mérite une autre justice.