Nous sommes au pire moment où l’émir débloque partiellement la situation mais la réforme n’est pas suffisante. Il doit se sortir rapidement de cette situation et rejoindre la rive des normes internationales pour tous les salariés expatriés dans le pays. Faute d’avancer, sa position devient dangereuse.
Un peu de politique
Ce soir, l’émir Tamim à lire les propos du représentant du Royaume Uni, Jim Murphy, devant le Parlement Européen doit se dire dans quoi j’ai mis le doigt. Murphy a indiqué que la réforme des normes pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des expatriés au Qatar était largement insuffisante. Même si tout le monde est conscient que le document Workers’ Welfare Standards est bourré de bonnes intentions comme dit le journal le Monde de cet après-midi. Nous sommes loin des garanties qui permettraient avec un peu de temps de régler définitivement le « problème » des conditions de travail au Qatar. La FIFA ce soir ne peut être satisfaite et le parlement européen non plus.
La société civile par la voix d’Ali bin Al Merri Simaikh, président des droits de l’homme, demande la mise en place avec insistance d’un salaire minimum et que le non-paiement du salaire soit considéré comme un délit et punissable comme tel. Enfin, il indique que le débat sur le kafala sponsorship n’est pas terminé. Il ne manque ce soir que l’opposition à l’émir, c’est-à-dire une partie du patronat et les conservateurs attachés à cette tradition issue de l’esclavage pour dire leur mécontentement.
La réforme est incomplète et inachevée
C’est donc pour l’émir le passage au milieu du gué, situation la plus inconfortable. Il doit se sortir rapidement de cette situation et rejoindre la rive des normes internationales pour tous les salariés expatriés dans le pays. Faire évoluer le kafala sponsorship en mettant à la place un véritable contrat de travail. Tout le monde dit ce soir, cette réforme est incomplète et inachevée. Toute attente dans la prise de décisions affaiblira l’émir.
Il faut sortir le plan B
Celui-ci comporte la création d’un statut de résident de longue durée et une modification substantielle du sponsorship permettant au salarié expatrié de changer d’employeur à sa guise et de quitter le pays s’il ne trouve pas d’emploi. Cette liberté retrouvée donne du sens à la possibilité pour le salarié de se soustraire à une situation de travail dangereuse. L’évolution récente concernant la sous location limitée des logements devrait quant à elle, si elle s’applique rapidement, faire avancer la surpopulation des logements actuels. La mise en place de ce plan B complété par d’autres mesures permettra à l’OIT un réel accompagnement de la réforme. Celle-ci mettra notamment à la disposition du Qatar les 500 inspecteurs et contrôleurs du travail nécessaires pour faire appliquer les 5 prochaines années la réforme du droit du travail au Qatar. Au-delà, la population expatriée devrait décroitre et se transformer avec l’arrivée d’autres expatriés plus qualifiés.
Pendant ce temps, le Qatar pourra former ses propres inspecteurs du travail. L’OIT devra aider le Qatar y compris à moraliser tout le circuit qui conduit le travailleur expatrié de son pays à celui-ci. L’émir est conscient qu’abolir le kafala sponsorship va créer une augmentation des salaires pour les bas niveaux de qualification. Le ministère de la planification et de la stratégie vient d’ailleurs de faire passer la prévision de l’inflation pour l’année 2014 de 2,5 à 3,9 en partie à cause du logement, une partie à cause de l’inflation mondiale mais aussi pour un tiers à l’intégration de l’évolution salariale probable.
L’émir doit terminer ce qu’il a commencé, la population du Qatar à terme se lassera d’être désignée du doigt au niveau international. Elle mérite de retrouver la sérénité nécessaire pour accéder au monde de demain auquel aspire le Qatar.