Hussein Shobokshi est un homme d’affaires et un éditorialiste éminent il exprime son opinion dans ASHARQ AL-AWSAT concernant le refus par l’Arabie saoudite de siéger à l’ONU sous le titre « Le rejet vaut mieux que la capitulation ». Je ne partage pas totalement sa vision de cette affaire.
Une prise de position attendue
Résumer l’affaire du refus par l’Arabie saoudite par une formule « Le rejet vaut mieux que la capitulation » est une des visions possible, mais certainement pas la seule. Le choix effectué par un comité ultra réduit autour du Roi Abdullah Bin Abdulaziz a permis à Saoud al-Fayçal le pilote de la diplomatie saoudienne de venir confirmer la politique du siège vide. Cette méthode est utilisée pour protester contre la « non décision » de l’ONU d’intervenir plus fortement dans le conflit syrien. Et d’une manière plus générale dans l’ensemble des problèmes du Moyen Orient qui trainent depuis des décennies.
La surprise a été réelle, car le choix de siéger préparé de longue date par la diplomatie saoudienne, aurait pu être tout aussi important que le refus de siéger. C’est une opération que j’appelle « fusil à un coup ». Si le bénéfice est immédiat en matière de communication donnant une stature plus importante au niveau international à l’Arabie saoudite, à moyen ou long terme c’est un mauvais choix.
L’Arabie saoudite un moyen provisoire pour ramener le calme au Moyen Orient
Le choix de critiquer l’efficacité et la vision sélective de l’ONU dans les conflits mondiaux est bien naturel de la part de l’Arabie saoudite. Mais l’ONU n’est pas un « machin » isolé de la géopolitique mondiale qui se joue certes dans cette instance mais aussi par quelques grandes puissances.
Lorsque OBAMA commence son repli du Moyen Orient et laisse plus de place aux saoudiens il en fixe quand même les limites. Il leur demande de ramener un certain calme dans une zone qui s’agite beaucoup. Pour cela il va jusqu’à demander à un des interlocuteurs locaux Hamad Al Thani de laisser son pouvoir à titre symbolique et le confier à son fils. Et il demande à ce même Qatar d’arrêter provisoirement l’agitation dont ils n’en maîtrisent pas tous les effets. Cela fut un bon coup de pouce à l’équipe du Roi Abdullah Bin Abdulaziz pour rétablir son autorité. Mais OBAMA n’entend pas remettre les clés du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord à un pays qui peut jouer les « sages » mais qui par son regard tourné un peu trop vers le passé ne peut pas être celui qui préparera l’avenir de cette partie du monde.
La colère non maitrisée de l’Arabie saoudite concernant le dossier syrien est compréhensible. Nous sommes très loin d’une destitution de Bachar al-Assad celui-ci pourrait peut être même sauvé sa tête. L’opposition au régime syrien n’ayant jamais réussi à se forger une place. L’alliance Turquie Qatar Arabie Saoudite ne peut fonctionner car aucun des trois n’est prêt à un compromis avec les deux autres.
Le manque de réformes internes en Arabie saoudite a fait craindre à une radicalisation encore plus grande et cela justifie le choix effectué, aux yeux de certains, depuis longtemps, de maintenir au pouvoir un dictateur sanguinaire mais qui peut servir de rempart. Bon nombre d’analystes mondiaux s’interrogent aujourd’hui sur la valeur ajoutée d’une déstabilisation explosive du moyen Orient et de l’Afrique du Nord.
Alors me direz-vous tout cela pour rien ? L’Arabie saoudite devait montrer son mécontentement car elle est trop souvent utilisée. L’offre de siéger à l’ONU était une reconnaissance internationale de plus pour renforcer son statut de soutien à l’équilibre de cette zone mais rien d’autre. Car pour aller au-delà est devenir la puissance régionale qu’elle mériterait d’être l’Arabie saoudite doit faire son aggiornamento et cela est une autre histoire.