Après avoir déjà durci les conditions d’indemnisation des demandeurs d’emploi en 2019, 2021 et 2023, le gouvernement a présenté les mesures qui s’appliqueraient dès le 1er juillet 2024.
Publié mercredi 5 juin 2024 – FRÉDÉRIC SOUILLOT – Secrétaire général de Force Ouvrière
À chaque fois, la réforme est pire que les précédentes, avec pour objectif d’accélérer le retour à l’emploi et de dégager des économies budgétaires, c’est une logique de vis sans fin !
Depuis 2017, l’exécutif s’acharne sur les chômeurs, avec toujours la même logique : diminuer les droits afin de contraindre les demandeurs d’emploi à reprendre n’importe quel emploi, à n’importe quel prix et dans n’importe quelles conditions ! Une telle logique conduit pourtant à exonérer, tant le gouvernement que les employeurs, de devoir faire en sorte d’améliorer la qualité des emplois et leurs rémunérations ainsi que l’accès à la formation. Depuis 2017, l’exécutif a repris la main sur l’Assurance chômage, au détriment des interlocuteurs sociaux qui, depuis 1958 et la création de l’Unédic à l’initiative d’André Bergeron, en avaient la gestion.
Désormais, il faudrait avoir travaillé huit mois au cours des vingt mois qui précèdent la fin du contrat de travail pour prétendre à une indemnisation, contre six mois actuellement au cours des vingt-quatre derniers, seuils qui étaient déjà bien hauts ! Désormais, la durée d’indemnisation sera réduite à quinze mois, alors qu’un demandeur d’emploi sur quatre est au chômage depuis plus d’un an et qu’au-delà de 50 ans, cette proportion dépasse les 40 % !
Arrêtons-nous un instant sur la situation des demandeurs d’emploi : quatre sur dix ont moins de 35 ans, près de la moitié ont un niveau de diplôme en dessous du baccalauréat, 40 % seulement sont indemnisés, pour une allocation mensuelle moyenne de 1 022 euros, un montant largement en dessous du seuil de pauvreté. Et environ un sur deux travaille, exerçant une activité réduite tout en restant inscrit à France Travail pour retrouver un meilleur emploi. En réalité, on est bien loin du cliché du chômeur oisif, qui vit grassement des allocations sans rechercher à travailler. Être au chômage ou au RSA, ce n’est pas un choix !
Nous mettrons tout en œuvre pour nous opposer et empêcher cette réforme
Pourtant le cliché a la vie dure et à chaque fois les sanctions sont toujours plus sévères. Mais comme la saignée au temps de Molière, le remède ne fonctionne pas, ce qui n’empêche pas le gouvernement de s’obstiner. Aucune étude sérieuse ne démontre que réduire les droits des demandeurs d’emploi crée des emplois : les quelques travaux menés sur les précédentes réformes indiquent que le durcissement des conditions d’indemnisation a poussé certains demandeurs d’emploi à revenir plus rapidement sur le marché du travail, mais avec une dégradation des conditions d’emploi, des contrats plus courts et de moins bonne qualité. L’institut de conjoncture OFCE a observé une substitution entre chômeurs qualifiés et moins qualifiés. Les plus qualifiés acceptent de prendre des emplois moins qualifiés et les demandeurs d’emploi moins qualifiés, ou qui ne sont pas indemnisés, restent au chômage. Au final, on indemnise moins et on ne fait pas baisser le chômage !
Pour FO, ce nouveau tour de vis est inacceptable. FO a déjà dit à l’exécutif qu’elle contestera le nouveau décret devant le Conseil d’État. Depuis, les autres organisations syndicales ont dit qu’elles nous rejoindraient dans cette démarche. Nous mettrons tout en œuvre pour nous opposer et empêcher cette réforme, y compris par la mobilisation. FO réaffirme que le chemin vers le plein-emploi passe par des politiques économiques qui garantissent des emplois pérennes et de qualité avec des salaires décents, de l’entrée dans la vie active à la retraite.