L’indispensable amélioration de la compétitivité de l’économie française doit s’accompagner d’efforts résolus pour traiter les handicaps structurels de son industrie.
Une publication de la Cour des Comptes décembre 2021
La France a, davantage que ses principaux partenaires, souffert du mouvement de désindustrialisation qui affecte la plupart des pays avancés. Sur la période récente, cette situation s’explique en large partie par la dégradation de la compétitivité coût que son économie a subie entre 2000 et 2010, dans un contexte où l’entrée dans l’euro a fait perdre l’arme de la dévaluation compétitive et où les partenaires de la France, singulièrement l’Allemagne, ont défendu activement leur compétitivité par la modération salariale et des réallocations de fiscalité.
Ces écarts de compétitivité-coût se sont partiellement résorbés au cours de la décennie 2010-2020. La progression des coûts de main d’œuvre a ralenti en France sous l’effet notamment de la fiscalisation d’une partie du financement de la protection sociale. Le coût du travail demeure toutefois parmi les plus élevés de l’Union Européenne (UE). En matière de fiscalité sur les entreprises, la France présente un niveau global élevé en comparaison avec ses principaux partenaires.
L’économie française souffre par ailleurs de handicaps structurels qui grèvent sa compétitivité hors coût. La recherche et développement se traduit insuffisamment en innovations industrielles. L’environnement des affaires demeure perfectible. L’image de l’industrie au sein de la population est dégradée. Le tissu industriel est marqué par la prépondérance de grands groupes dont les stratégies d’internationalisation, contrairement à d’autres pays européens, ne favorisent pas la production de biens à partir de la France alors que les petites et moyennes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire peinent à se développer.
L’indispensable amélioration de la compétitivité de l’économie française doit s’accompagner d’efforts résolus pour traiter les handicaps structurels de son industrie. Cinq leviers doivent être prioritairement actionnés ce but :
– Poursuivre les efforts d’amélioration de la compétitivité-coût (coût du travail et fiscalité) et hors coût (environnement des affaires, diffusion de l’innovation et renforcement des compétences) ;
– Mieux piloter la politique industrielle, qui doit être davantage coordonnée avec les politiques de l’énergie, de la recherche et de l’innovation et les politiques sectorielles comme la santé. Ce pilotage doit s’appuyer sur une identification claire des moyens publics mobilisés et des indicateurs de résultats
– Cibler davantage les soutiens publics sur un nombre limité de priorités, encadrés par une gouvernance rigoureuse, la plus indépendante possible et assise sur des évaluations, afin d’éviter leur captation par certains acteurs et le saupoudrage ;
– Appuyer la politique industrielle sur les financements européens et les projets de coopération pour maintenir l’Union européenne à la frontière technologique. La sécurisation des chaînes d’approvisionnement doit également, sauf exception, s’appuyer sur le marché européen ;
– Inscrire les réponses aux défis de la transition numérique et de la décarbonation de l’industrie française dans la durée au niveau national et dans le cadre d’une coordination à l’échelle de l’Union européenne.