Si le nombre d’inspecteurs du travail a quasiment doublé quel est son pouvoir réel aujourd’hui ?
Les patrons qataris ou dirigeants étrangers ont du mal à accepter une évolution du droit.
Dans un récent rapport, l’ONG, Amnesty International s’interroge sur le pouvoir réel des inspecteurs du travail au Qatar.
Fin 2017, le journaliste et écrivain Emmanuel Razavi publiait « Qatar les vérités interdites. Un émirat au bord de l’implosion. » « Éditeur l’Artilleur.» Il relate son vécu pendant trois ans au Qatar. Il aborde dans son livre, entre autres, l’inspection du travail au Qatar. Il confirme la volonté de l’émir Tamim de faire avancer son pays en matière de droits de l’homme et des conditions de vie au travail. Il indique aussi que l’émir prend un risque de braquer une partie du patronat qatarien. Cette volonté de l’émir est nécessaire mais est-ce suffisant ?
Voici ce que raconte Emmanuel Razavi dans son livre lors d’un entretien qu’il avait eu avec un inspecteur du travail qatari. « Si je contrôle quelqu’un d’important et que je constate qu’il est en infraction, me confia- t-il, il me propose de me payer pour que je me taise. Si je décline son offre il me menace alors d’intervenir auprès du ministère du travail pour que je sois renvoyé de mon poste. Moi je n’ai jamais cédé à ce genre de chantage. Mais inévitablement il y a des inspecteurs qui ont peur de perdre leur emploi… »
Razavi termine ce paragraphe en indiquant que cette inspection du travail a peu d’influence sur une population bédouine encore imprégnée de ses traditions d’esclavagistes. Le livre de Razavi « Qatar les vérités interdites. Un émirat au bord de l’implosion. » « Editeur l’Artilleur.» montre par d’autres exemples que l’autorité de l’Etat est des plus fragile au Qatar.
En ce début 2019, voici ce que rapporte Amnesty International : Des inspections du travail rigoureuses garantissant que les employeurs respectent les droits des travailleurs et respectent leurs obligations légales, tout en conseillant les autorités sur les failles des lois et des politiques, constituent un mécanisme essentiel permettant aux gouvernements de protéger les travailleurs contre les employeurs abusifs.
Selon les informations communiquées au BIT, le nombre d’inspecteurs au Qatar est passé de 200 en 2012 à 397 fin 2017.
Bien que toute augmentation soit la bienvenue, des questions subsistent quant à savoir si ce nombre est suffisant pour inspecter de manière régulière et rigoureuse plus de 76 000 entreprises dans le pays et si les inspecteurs ont les capacités voulues, telles que les compétences linguistiques, pour jouer leur rôle au niveau requis et communiquer avec la grande majorité des travailleurs parlant d’autres langues. Un rapport d’avancement de l’OIT paru en octobre 2018 indiquait que l’OIT et le gouvernement élaboraient un plan d’action sur l’inspection sans préciser davantage.
Comme nous l’avons indiqué à plusieurs reprises, les mentalités des qataris, en matière de ressources humains, mettront longtemps avant d’évoluer. Alors que les travailleurs expatriés représentent 95 % de la population active, au-delà des mots, ils continuent à être exposés à de graves abus, notamment le travail forcé et les restrictions à la liberté de circulation.