L’alerte donnée par le ministre des Finances du Qatar sur les perspectives économiques sur trois ans, montre que ce pays fait un pas vers la maturité et la crédibilité. Reste maintenant à en tirer les conclusions.
Le Qatar améliore sa transparence économique mais a plusieurs problèmes à régler
Il y a quelques semaines, l’agence de notation Fitch, malgré la conjoncture internationale et la baisse des prix du pétrole, considérait que le Qatar avait pris les mesures d’économies nécessaires pour éviter tout dérapage de son budget. L’alerte donnée par le ministre des Finances du Qatar sur les perspectives économiques sur trois ans, montre que ce pays fait un pas vers la maturité et la crédibilité. Mais plusieurs éléments ont été sous-estimés, tant par Fitch que les autres agences de notations.
Le premier point qui pose problème est la volonté de l’émir Tamim al Thani d’armer son pays bien au-delà de ce qui est nécessaire et en contradiction avec ses alliances. Le Qatar dispose sur son sol de la plus grande base américaine au monde hors USA. Si on ajoute à cela une alliance militaire sans limites avec la Turquie qui elle aussi s’installe sur le sol qatarien, on comprend mal la course aux armements en cours. L’émir Tamim doit se montrer raisonnable et compter sur ses alliances, même fragiles, il ne pourra pas continuer sans fin à s’équiper en armes de plus en plus sophistiquées à des prix exorbitants.
Signalons toutefois une décision qui pourrait s’avérer pertinente. Le Qatar vient d’annoncer par différents responsables qu’il souhaite des drones « made in Qatar ». Le lien est fait avec le secteur des satellites et la mise en service en 2017 du téléport. Voilà un choix qui permet de s’équiper militairement et de développer un secteur économique privé à haute valeur ajoutée.
Le deuxième point qui pose problème pour la maitrise de l’économie du Qatar ce sont ses choix du paraitre comme le secteur footballistique. Si l’achat du PSG et d’autres clubs ainsi que toute une infrastructure autour du football à moyen terme pourrait s’avérer approprié, en ce qui concerne la Coupe du monde 2022 au Qatar, la communication s’avère désastreuse. L’image du Qatar est associée à la corruption même si rien n’est prouvé pour l’instant. Des milliers d’articles dénoncent régulièrement les mauvaises conditions de travail des expatriés alors que c’était une réalité connue avant l’attribution de la Coupe 2022 et le lot de l’ensemble des pays du Golfe. Enfin, le Qatar s’est vanté de dépenser 200 milliards de dollars, faisant de la Coupe 2022 la plus chère au monde, alors que la réalité des dépenses directement liées à cet évènement international ne dépassera pas 30 milliards. Compte tenu de la crise des prix des hydrocarbures, le Qatar devrait en accord avec la FIFA, partager l’organisation de cette Coupe 2022 avec les Emirats Arabes Unis. Ce pays très proche pouvant accueillir 25 % de la compétition avec des infrastructures existantes permettant ainsi au Qatar de ne pas surinvestir et de garder l’essentiel de la Coupe 2022 sur son territoire. Voilà un geste concret qui pourrait renforcer les liens entre ces deux pays.
Le troisième point qui pose problème est le manque d’adaptation d’une grande partie de la population qatarienne au nouveau modèle économique du Qatar qui donne une place importante au secteur privé. La population autochtone qui est désormais en dessous de la barre des 10 % de la population totale du pays, n’a pas assez intégré le changement brutal lié à la baisse du prix des hydrocarbures. Cette crise arrive trop tôt. Le Qatar doit se donner les moyens pour modifier les mentalités. En outre, il faut ouvrir la possibilité pour 50 000 expatriés à un statut de résident de longue durée.
Chaque problème a sa solution voire plusieurs possibilités de le résoudre. Le premier ministre du Qatar qui doit mettre en œuvre la volonté politique de l’émir est-il à la hauteur de la situation ?