Lorsqu’un expatrié arrive à Doha, il sait que sur le sol qatari il y a des droits et des devoirs à respecter. Mais lorsqu’une entreprise de la taille de Qatar Airways ambitionne d’être une compagnie mondiale peut-elle exiger un comportement comme si on était au Qatar ? Averroès disait : Le savoir acquis dans un pays étranger peut être une patrie et l’ignorance un exil vécu dans son propre pays.»
Evolution des droits du travail chez Qatar Airways
Plusieurs médias ont rapporté une réunion, qui a eu lieu ces jours-ci dans un hôtel prés de Hamad International Airport, où étaient conviés 200 personnels de Qatar Airvays, en la présence de Rossen Dimitrov vice-président de cette compagnie. La réunion avait comme but de « discuter » des difficultés exprimées par le personnel de la compagnie comme l’utilisation du téléphone mobile dans certaines occasions, le fameux couvre-feu pour ceux qui habitent dans des logements de la compagnie… Cette discussion est une nouveauté dans une compagnie où les syndicats ne sont pas autorisés et même combattus par le dirigeant N°1 Akbar Al Baker.
Rossen Dimitrov le vice-président de Qatar Airways rappelait que deux demandes importantes émanant des salariés avaient évoluées ces derniers mois, la première concernant le licenciement des personnels féminin de cabine lorsqu’elles étaient enceintes et la seconde l’autorisation expresse de la part de la compagnie avant de se marier. Certes la condamnation par l’OIT de ces dispositions dans le contrat de travail n’est pas étrangère à ces modifications mais globalement ce qu’il résulte de cette échange, c’est que Qatar Airways va faire évoluer le droit du travail au sein de la compagnie. En attendant ces évolutions, les qatariens nous ayant habitué à jouer avec le temps, rappelons qu’actuellement la société Qatar Airways emploie 9 000 personnels et que dans les années à venir ce sont plus de 6 000 embauches qui devraient venir renforcer l’entreprise internationale compte tenu de son expansion mondiale.
Lorsqu’un expatrié arrive à Doha, il sait que sur le sol qatari il y a des droits et des devoirs à respecter. Mais lorsqu’une entreprise de la taille de Qatar Airways ambitionne d’être une compagnie mondiale peut-elle exiger un comportement comme si on était au Qatar ? Sur le fond, on peut s’interroger sur la prise en compte par les dirigeants de Qatar Airways de la transformation d’une petite société d’un pays du Golfe en une grande compagnie internationale.
Le Qatariens vivent mal la mondialisation
Sur les cinquante dernières années le Qatar a connu des moments difficiles. La prospérité que nous lui connaissons aujourd’hui date de moins de dix ans. Comme l’indique Mehdi LAZAR, expert du Qatar, dans « La revue géopolitique on line, » « Le QATAR fait partie des nouveaux acteurs étatiques dynamiques qui bénéficient du processus de globalisation et du basculement du monde vers l’Asie, notamment depuis la crise financière de 2008. Dans le cas spécifique de l’émirat à la perle, cela s’inscrit dans un contexte de forte hausse de son PIB suite à l’augmentation des prix des hydrocarbures durant la décennie 2000 et à ses investissements dans des infrastructures de production de gaz naturel liquéfié. »
Une partie de l’argent des hydrocarbures a été placé sur Qatar Airways et le développement du tourisme. Alors que l’offre locale, dans les pays du Golfe, est déjà abondante, tant sur le tourisme que sur le transport aérien, le Qatar veut s’insérer dans ces marchés qui peuvent sembler porteur. Pour s’ouvrir au tourisme ou l’envie de transporter le monde entier dans ces appareils un pays comme le Qatar doit accepter la nécessaire formule « quand deux corps chimiques se combinent, tous deux subissent une altération. »
Or dans les mentalités qataries c’est loin d’être le cas. On peut vouloir parquer les touristes sur des iles ou des lieux appropriés, la formule existe et c’est loin d’être une réussite. Les autorités qataries connaissent l’autre formule, un échange des touristes avec la population. Or, au Qatar c’est impossible, la population de souche n’est pas disponible pour accueillir ces voyageurs, elle a souvent autre chose à faire, fonctionnaires, entrepreneurs… Un tourisme où l’accueil des voyageurs ne serait seulement que le fait de travailleurs étrangers, au-delà de leur compétences reconnues, ne permettra pas un véritable échange avec les qataris. De même pour le transport aérien, vouloir imposer les règles d’un pays à majorité wahhabite comme le Qatar, à une société internationale comme Qatar Airways cela n’a pas de sens. La plus qu’ailleurs la formule « quand deux corps chimiques se combinent, tous deux subissent une altération, » devrait s’appliquer.
Au-delà des dirigeants de Qatar Airways et notamment de son N°1 Akbar Al Baker qui aujourd’hui ne devrait plus intervenir publiquement, tant il fait tort à la société, étant dans le droit fil de ceux qui au Qatar naïvement pensent pouvoir imposer au monde leur façon de concevoir la société. Ce qui s’est passé à Londres ces jours derniers va dans le même sens. Une polémique s’est emparée des réseaux sociaux qatariens concernant le photographe Dougie Wallace qui a eu l’outrecuidance de photographier quelques riches qataris, au milieu de tant de nationalités, sortants des beaux magasins de Knightsbridge. Est-il étonnant de voir quelques riches qataris faire des emplettes dans les beaux quartiers de Londres ? La plupart des riches habitants du Golfe et de la planète fréquentent les grandes capitales comme Londres, Paris, Milan … et cela depuis des décennies. Il est certain que les qatariens qui viennent en masse à Londres doivent s’attendre à être vus sur des photos, car ils font partie de Londres et c’est leur choix.
Mais Akbar Al Baker, le N°1 de Qatar Airways, n’est que le reflet de l’émir Tamim dirigeant du Qatar. En effet celui-ci a du mal à trouver sa place entre les conservateurs, souvent religieux, qui le tirent vers le passé, au temps de son grand-père qui dirigeait le Qatar dans une discrétion absolue, et la ligne fixé par son père, l’ancien émir Hamad, qui était certes « un émir despote mais éclairé, wahhabite mais moderne,» trop récent dans le métier, Tamim a encore du mal à se livrer, à fendre l’armure. Nous l’avons déjà indiqué, mais on l’a que très rarement vu avec une de ses femmes au niveau international, à notre époque cette une faute de communication impardonnable.
C’est ce cap qui doit conduire le Qatar vers son futur qui manque aujourd’hui et qui déstabilise les dirigeants des entreprises qatariennes qui se figent dans des lois inadaptées à la conquête économique du monde, comme à Qatar Airways. D’ailleurs le traitement des femmes dans cette société qatarienne ne respecte même pas une ancienne histoire que l’on raconte au Qatar, Journals Openedition, les « anciens » savent que la femme peut gagner certaines compétitions au détriment des hommes.
Notre conclusion provisoire vient d’Averroès : Le savoir acquis dans un pays étranger peut être une patrie et l’ignorance un exil vécu dans son propre pays »