Le marché de l’emploi tendu confère aux professionnels de santé un pouvoir qu’il convient de réguler. Les conséquences sont préoccupantes, sur le plan financier, sur le plan de l’attractivité des emplois permanents ou sur le travail en équipe dont dépend la qualité et la sécurité des soins.
COUR DES COMPTES 23.07.2024
Dans un contexte de pénurie de médecins, le recours à l’intérim est resté limité dans les hôpitaux publics, mais d’autres formes de contrats d’emplois temporaires se sont largement développées pour assurer notamment la permanence des soins. Or, les conditions de rémunération ne respectant pas les plafonds réglementaires, un renforcement de la réglementation a été mis en œuvre. La Cour estime qu’il devrait s’inscrire dans une stratégie de réorganisation de l’offre de soins, coordonnée par les agences régionales de santé.
CONCLUSION du rapport – page 64 –
La mise en œuvre en avril 2023 de l’article 33 de la loi du 26 avril 2021 dans les hôpitaux publics traduit la volonté de limiter les dérives constatées en matière de rémunération des emplois temporaires, recrutés pour pallier une insuffisance de temps médical.
La démarche adoptée a tiré les enseignements d’une première tentative de régulation en 2017, mise en échec. Elle tient compte de la progression constante depuis 2017 du nombre de contrats de gré à gré ne respectant pas le cadre réglementaire. Le report de 17 mois de son entrée en vigueur a permis de compléter le dispositif par la refonte des statuts de praticien hospitalier et de praticien contractuel, et de promouvoir le recours à la prime de solidarité territoriale, conçue comme un substitutif à l’intérim médical et aux contrats de gré à gré.
La meilleure maîtrise du respect des plafonds de rémunération réglementaires repose en effet sur un contrôle renforcé confié au comptable public, mais surtout sur des leviers financiers : une revalorisation des montants-plafond autorisés pour les contractuels et la rémunération des heures supplémentaires en dehors de leur établissement, afin de développer la solidarité entre établissements.
Cette seule régulation par les tarifs a toutefois introduit des effets d’aubaine. Le marché de l’emploi tendu confère aux professionnels de santé un pouvoir qu’il convient de réguler.
Les conséquences sont préoccupantes, sur le plan financier, sur le plan de l’attractivité des emplois permanents ou sur le travail en équipe dont dépend la qualité et la sécurité des soins. La mobilisation des moyens, notamment financiers, n’empêche pas des fermetures ou réductions d’activité ponctuelles ou récurrentes. Une réorganisation assumée et volontariste de l’offre de soins permettrait, en densifiant les activités, de reconstituer des équipes médicales de taille suffisante et d’organiser des parcours de soins sécurisés.