Question écrite n° 02782 de Mme Marie-Noëlle Lienemann (Paris – CRCE) publiée dans le JO Sénat du 22/09/2022 – page 4513.
Le groupe américain Heico Corp va finaliser l’acquisition d’Exxelia
Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l’attention de M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur le passage sous contrôle américain du groupe industriel Exxelia.
En un demi-siècle, la discrète usine Exxelia de Pessac (Gironde) s’est installée au sommet mondial d’une activité de niche dans l’électronique haute performance. Exxelia Pessac est un des 12 sites industriels du groupe industriel français Exxelia (160 millions d’euros de chiffre d’affaires). Il compte 120 salariés et ne connaît pas la crise. Après avoir réalisé 21 millions d’euros en 2021, son chiffre d’affaires 2022 devrait atteindre 25 millions ; les salariés du site produisent des pièces essentielles mais peu chères, à hauteur de 50 millions par an. Le site dispose d’un an de visibilité sur ses carnets de commandes.
Une performance qui explique l’intérêt du groupe américain Heico Corp. pour le groupe français. Cette société va finaliser l’acquisition d’Exxelia en fin d’année. Or la production d’Exxelia équipe le Rafale, l’A320 neo, Ariane 5 et bientôt 6, les sous-marins Barracuda ou le Boeing 787 dreamliner, mais aussi les constellations de satellites Galileo ou Oneweb ou encore les F18 et F35 américains…
Cette activité en lien avec les secteurs aéronautique et spatial ne représente cependant que 10 % du chiffres d’affaires, l’essentiel de la production concernant les matériaux et surtout les condensateurs céramiques pour des industries de pointe comme les radars ou les IRM médicaux.
Si Heico n’est pas présent sur les marchés d’Exxelia, il convient pourtant de s’interroger sur l’intérêt de notre pays à voir passer ce groupe de pointe stratégique sous le pavillon d’une société américaine, sachant que les États-Unis d’Amérique prétendront désormais la soumettre au moins partiellement à leur législation, ce qui implique un pouvoir de contrôle sur l’utilisation des matériels, y compris en déploiement militaire comme pour le Rafale.
Or depuis décembre 2014, Exxelia était détenue par la société britannique de capital-investissements IK investments Partners, ce qui n’était déjà pas sans poser question en matière de souveraineté industrielle.
Exellia bénéficie par ailleurs du programme « Industrie du futur » lancé en 2019, pour quatre ans, financé par l’État, les régions, l’opérateur de compétences interindustriel (OPCO 2i), les entreprises et le groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS).
Au regard de l’importance stratégique de cette entreprise, elle lui demande donc si la direction générale du trésor a fait passer ce type d’investissement américain par la phase d’opération soumise à autorisation préalable d’investissement étranger en France (IEF), renforcés par le décret n° 2014-479 du 14 mai 2014 relatif aux investissements étrangers soumis à autorisation préalable, et, si cela n’a pas été le cas, elle souhaite savoir pourquoi la phase d’autorisation préalable n’a pas été réalisée.
Elle lui demande ce que compte faire le Gouvernement pour s’assurer que les compétences, brevets et process industriels d’Exxelia ne soit pas détournés aux profits des intérêts industriels et nationaux américains. Elle lui demande enfin de lui indiquer quelles seraient les conditions pour que le groupe Exxelia repasse à moyen terme sous pavillon français.
(En attente de réponse du Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.)