Pour cela, il faudra clarifier dans les prochains jours la part de responsabilité et de coopération que les différentes formations de l’Assemblée nationale sont prêtes à prendre.
Françaises, Français, Mes chers compatriotes
Le 24 avril, vous m’avez renouvelé votre confiance en m’élisant Président de la République. Vous l’avez fait sur le fondement d’un projet clair, et en me donnant une légitimité claire. Les 12 et 19 juin dernier, vous avez voté pour vos députés et élire notre Assemblée nationale. Je veux ici féliciter les parlementaires ayant emporté vos suffrages, et j’ai aussi une pensée pour les députés sortants battus.
Je ne peux d’abord ignorer la forte abstention qui nous oblige tous à redonner davantage de sens à nos actions collectives, de lisibilité aux grands rendez-vous démocratiques. Voter est essentiel pour la vie de la nation, pour ses grands choix et très clairement, ce n’est plus ressenti par tous. Je ne peux pas davantage ignorer les fractures, les divisions profondes qui traversent notre pays, et se reflètent dans la composition de la nouvelle Assemblée. Elles expriment des inquiétudes, le sentiment d’avoir des vies bloquées, pas de perspectives dans nombre de nos quartiers populaires, comme dans nos villages.
Ces élections législatives ont fait de la majorité présidentielle la première force politique de l’Assemblée nationale. Toutefois, et c’est un fait nouveau, et comme dans la plupart des démocraties occidentales, qu’il s’agisse de l’Allemagne, de l’Italie, et de beaucoup d’autres, aucune force politique ne peut aujourd’hui faire les lois seule.
Il a manqué une trentaine de députés sur 577, et la majorité présidentielle est en effet relative. Sa responsabilité est donc de s’élargir, soit en bâtissant un contrat de coalition, soit en construisant des majorités texte par texte. Oui, pour agir dans votre intérêt et dans celui de la nation nous devons collectivement apprendre à gouverner et légiférer différemment. Bâtir avec les formations politiques constituant la nouvelle assemblée des compromis nouveaux dans le dialogue, l’écoute, le respect. C’est ce que vous avez souhaité et j’en prends acte. Cela ne doit pas vouloir dire l’immobilisme. Cela doit signifier des accords en prenant le temps de les faire, par le dialogue, le respect, l’exigence.
J’entends et suis décidé à prendre en charge la volonté de changement que le pays a clairement exprimé. Parce que c’est mon rôle comme garant de nos institutions, j’ai échangé hier et aujourd’hui avec les dirigeants de l’ensemble des formations politiques qui sont en capacité de constituer un groupe à l’Assemblée nationale. Je crois retranscrire avec justesse la teneur de nos entretiens en soulignant d’abord que tous ont fait part de leur respect pour nos institutions et de leur volonté d’éviter un blocage pour notre pays. Je salue cet esprit de responsabilité et je souhaite qu’il s’inscrive dans la durée. La plupart des dirigeants que j’ai reçus ont exclu l’hypothèse d’un Gouvernement d’union nationale, laquelle d’ailleurs n’est à mes yeux pas justifiée à ce jour. Beaucoup ont aussi fait part de leur disponibilité pour avancer sur des sujets majeurs et urgents pour votre quotidien : le pouvoir d’achat, le travail, les moyens d’atteindre le plein emploi, la transition écologique, la sécurité. Je crois qu’il est donc possible, dans le moment crucial que nous vivons, de trouver une majorité plus large et plus claire pour agir.
Vous le savez, je suis convaincu de la nécessité du dépassement politique depuis le premier jour. Je l’ai largement pratiqué et y répond, je le sais, à l’aspiration de nombre d’entre vous de sortir, au fond, des querelles et des postures politiciennes, de bâtir par le dialogue, le compromis, le travail collectif. Je souhaite donc, dans les prochaines semaines, que ce dépassement politique se poursuive avec clarté et responsabilité.
D’abord, la clarté.
Cela veut dire ne jamais perdre la cohérence du projet que vous avez choisi en avril dernier. C’est un projet d’indépendance pour notre pays, la France et dans notre Europe que nous devons rendre plus forte, qui passe par une défense forte et ambitieuse, une recherche d’excellence, une industrie et une agriculture plus puissantes par des investissements d’avenir, un projet de progrès sociaux, en particulier pour notre école et notre santé qu’il faut refonder, sur lesquels nous devons réinvestir, un projet de progrès écologique par une planification et des investissements assumés. Un projet de sécurité et de justice, mais aussi un projet responsable, c’est-à-dire crédible et financé.
Pour ce faire, dès cet été, il nous faudra prendre, nous le savons, des mesures d’urgence pour répondre aux besoins du pays et de votre quotidien. Une loi pour le pouvoir d’achat et pour que le travail paie mieux, des premières décisions pour aller vers le plein emploi, des choix forts sur l’énergie et le climat, des mesures d’urgence pour notre santé, qu’il s’agisse de notre hôpital ou de l’épidémie. Tous ces progrès ne sauraient-être financés ni par plus d’impôts, ni par plus de dette budgétaire et écologique. C’est pourquoi notre pays, plus que jamais, a besoin de réformes ambitieuses pour continuer de créer plus de richesses, plus de travail et innover davantage. Ça c’est la clarté.
La responsabilité ensuite.
Il faudra bâtir, comme je l’expliquais, des compromis, des enrichissements, des amendements, mais le faire en toute transparence, à ciel ouvert si je puis dire, dans une volonté d’union et d’action pour la nation qui concerne toutes les forces politiques, à commencer par la majorité présidentielle mais aussi toutes les autres, les forces vives, les partenaires sociaux, les élus, les associations, nous tous. Pour cela, il faudra clarifier dans les prochains jours la part de responsabilité et de coopération que les différentes formations de l’Assemblée nationale sont prêtes à prendre. Entrer dans une coalition de gouvernement et d’action. S’engager à voter simplement certains textes, notre budget.
Pour avancer utilement, il revient maintenant aux groupes politiques de dire, en toute transparence, jusqu’où ils sont prêts à aller. Demain et vendredi, je vous représenterai au Conseil européen où nous allons examiner en particulier la question décisive de la candidature à l’adhésion de l’Ukraine à notre Union européenne et du contexte géopolitique.
Dès mon retour, à la lumière des premiers choix, des premières expressions des groupes politiques de notre Assemblée nationale, nous commencerons à bâtir cette méthode et cette configuration nouvelle.
Voilà, mes chers compatriotes, ce que ce soir, je voulais vous dire. J’ai confiance dans l’esprit de responsabilité de tous. J’ai surtout confiance en vous, en nous. Vous avez, en avril et en juin, fait deux choix clairs et j’en prends acte. Ma responsabilité, c’est de les faire vivre et de les faire vivre à votre service pour que la France soit plus forte et que les réponses soient plus adaptées, construites différemment, mais plus adaptées aux défis de votre quotidien et du pays. Je n’aurai qu’une boussole, que nous avancions au service de l’intérêt général. Et j’ai confiance parce qu’ensemble, nous avons traversé tant de crise, tant de difficultés ces dernières années, que je sais que tous ensemble, nous trouverons le chemin de la réussite collective. Je vous remercie.
Vive la République et vive la France !