Les ministres américains des affaires étrangères et de la défense essaient de déminer le terrain entre Trump et le Qatar car leur réputation est en jeu.
Le président américain abandonne le sujet du Qatar à ses ministres, pour l’instant
Les démineurs du gouvernement Trump, Mattis et Tillerson, respectivement ministres de la défense et des affaires étrangères n’ont pas d’autre choix que de soutenir le Qatar.
La logique aurait voulu qu’après les « tweets de Trump », de début juin 2017, les américains se retirent du Qatar. On ne peut accuser un pays de favoriser le terrorisme au niveau mondial et y laisser la plus grande base américaine au monde hors US. Mais le général James Mattis, l’actuel secrétaire à la Défense des US ne partageait pas la vision de Trump.
L’ancien patron du CENTCOM, le quartier général des forces américaines au Moyen-Orient, implanté sur la base de Tampa en Floride et dont le QG avancé est sur la base d’Al-Udeid, au Qatar, ne pouvait accepter les propos de Trump, car ils sonnaient comme une remise en cause du travail du renseignement américain dans le Golfe. Les grandes « oreilles » de l’armée américaine sur la base d’Al Udeid écoutent tout l’espace du Golfe et savent en particulier tout de ce qui se trame au Qatar. Les américains ont bien souvent utilisé le Qatar et les Frères Musulmans au Moyen Orient et en Afrique du Nord. L’ancien premier ministre du Qatar HBJ, membre de la famille royale, avait d’ailleurs été clair, en début de crise dans le Golfe, si Trump continuait, il allait sortir les dossiers. Le général James Mattis ne pouvait pas laisser le président américain continuer ses accusations sans mettre en danger le renseignement américain dans le Golfe et sa propre réputation.
Pour ce qui concerne Rex Tillerson, il a côtoyé de nombreux responsables des pays du Golfe, car des 1995 il est le président de Exxon Yémen et puis en 2004 il devient le dirigeant d‘Exxon Mobil. Or si le Qatar est le premier exportateur mondial de Gaz Naturel Liquéfié il le doit avant tout à Rex Tillerson et à Exxon Mobil. On parle souvent du boycott du Qatar, mais nous savons tous que les exportations d’hydrocarbures depuis le Qatar n’ont jamais été empêchées. On se rappelle de cette information de Reuters, le lendemain du boycott du Qatar : «(Reuters) – Exxon Mobil Corp said on Tuesday that production and exports of liquefied natural gas from Qatar have not been affected by rising diplomatic tensions in the Middle East. » Ceci évidemment n’est pas le fruit du hasard.
En se portant garant pour le Qatar, les deux ministres Tillerson et Mattis sont contraints désormais de mettre la pression sur les autorités qatariennes, pour qu’ils maîtrisent les financements accordés à la myriade d’associations et organismes qu’ils font vivre. Trump a certes abandonné le dossier Qatar à ses ministres mais il se tient en embuscade. En cas de dérapage sérieux du Qatar, il pourrait bien, avec une seule boule, faire un « strike » sur ce pays et ses deux ministres. Quant au boycott du Qatar, il s’en lave les mains.