Emmanuel Razavi vient de publier « Qatar les vérités interdites. » Il aborde dans son livre, entre autres, l’inspection du travail du Qatar qui fait de son mieux, au sein d’une population bédouine encore imprégnée de ses traditions d’esclavagistes.
La volonté de l’émir du Qatar
Le dirigeant du Qatar Tamim bin Hamad al Thani a bien compris que si son pays voulait s’insérer dans la mondialisation, il fallait, à pas de géant, se sortir de la mentalité d’une population bédouine encore imprégnée de ses traditions d’esclavagistes.
On se souvient que l’OIT a examiné le 8 novembre 2017, la plainte relative au non-respect par le Qatar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et de la convention (nº 81) sur l’inspection du travail, 1947, déposée par des délégués à la 103 e session (2014) de la Conférence internationale du Travail en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT.
Certes l’OIT n’a pas donné suite notamment à la plainte concernant l’inspection du travail, lui préférant un accord de coopération avec le Qatar, mais cette organisation internationale du travail, organe de recours, n’a pas forcément pris conscience de l’endroit où elle mettait les pieds.
Le journaliste et écrivain Emmanuel Razavi vient de publier « Qatar les vérités interdites. Un émirat au bord de l’implosion. » « Éditeur l’Artilleur.» Il relate son vécu pendant trois ans au Qatar. Il aborde dans son livre, entre autres, l’inspection du travail du Qatar. Il confirme la volonté de l’émir Tamim de faire avancer son pays en matière de droits de l’homme et des conditions de vie au travail. Il indique aussi que l’émir prend un risque de braquer une partie du patronat qatarien. Cette volonté de l’émir est nécessaire mais est-ce suffisant ?
Une réalité qui puise ses racines dans des traditions d’esclavagistes
Nous avons fait des recherches sur le Qatar et voici ce qu’il ressort. Au début des années 1900 sur une population d’environ 13 000 personnes il y avait 6 000 esclaves noirs dont 2 000 affranchis. Une bonne partie d’entre eux étaient nés en captivité. Si les femmes étaient des domestiques ainsi que quelques hommes, ceux-ci pour l’essentiel avaient deux activités soit la pêche des perles soit ils servaient de gardes pour la famille Al Thani au pouvoir.
Le Qatar jusqu’à 1971 où-il a acquis son indépendance était sous protectorat anglais. Il fallut toute la volonté des anglais pour que cet esclavage fût aboli en 1952. Les maîtres jusqu’au bout s’opposèrent à cette abolition qui était pour eux une opportunité économique… Ils purent toutefois sauvegarder l’idée d’un parrainage, (Kafala), notion largement étendue dans le Golfe. Il se dit que cheikh Ali ben Abdallah Al Thani qui dirigeait le Qatar en 1952, dû octroyer une compensation financière pour chaque esclave libéré. Une partie d’entre eux furent vendus à l’Arabie saoudite et au Sultanat d’Oman qui respectivement abolirent l’esclavage en 1968 et en 1970, Bahreïn l’avait aboli en 1937 et le Koweït en 1949. Voilà le contexte, l’abolition de l’esclavage est récente.
Redonnons la parole à Emmanuel Razavi qui nous raconte dans son livre un entretien qu’il avait eu avec un inspecteur du travail qatari. « Si je contrôle quelqu’un d’important et que je constate qu’il est en infraction, me confia- t-il, il me propose de me payer pour que je me taise. Si je décline son offre il me menace alors d’intervenir auprès du ministère du travail pour que je sois renvoyé de mon poste. Moi je n’ai jamais cédé à ce genre de chantage. Mais inévitablement il y a des inspecteurs qui ont peur de perdre leur emploi… »
Razavi termine ce paragraphe en indiquant que cette inspection du travail a peu d’influence sur une population bédouine encore imprégnée de ses traditions d’esclavagistes. Le livre de Razavi « Qatar les vérités interdites. Un émirat au bord de l’implosion. » « Editeur l’Artilleur.» montre par d’autres exemples que l’autorité de l’Etat est des plus fragile au Qatar.
L’OIT en participant à la modification de ces mentalités au Qatar, en particulier pour faire évoluer les droits de l’homme et du travail, s’est attaquée à un sacré chantier. Et ce n’est pas l’accord qui vient d’être signé par l’entreprise qatarie QDVC, qui créée ses propres instances de contrôle et d’inspection du droit applicable dans son entreprise qui va nous rassurer.