Comment les agences de notations appréhendent certains choix économiques du Qatar et cela aurait-il à terme des conséquences sur la notation du pays.
Une économie en trompe l’œil
Si l’édifice économique qatarien est en général bien placé dans les classements internationaux, on peut s’interroger sur certains choix ?
En premier lieu, l’affaire Volkswagen où le Qatar est le troisième pilier du constructeur allemand avec 17 % des actions. Comment un jeune qatarien qui étudie l’économie d’entreprise peut-il interpréter la décision des actionnaires du fonds souverain du Qatar, de voter pour soutenir l’ancienne direction de Volkswagen accusée de « tricheries ». Ne fallait-il pas suivre l’exemple du Land de Basse-Saxe qui s’est abstenu ne voulant pas se positionner par rapport aux procédures judiciaires en cours ? Alors que le Qatar subi la baisse des prix des hydrocarbures, l’obligeant à s’endetter pour continuer son développement, les dividendes que le fonds souverain QIA aurait dû percevoir ont fondu comme neige au soleil.
En deuxième lieu, la filière luxe. En septembre 2013 QELA, la marque de la filière luxe qatarie, avait ouvert sa première boutique à The Pearl à Doha. Ensuite elle devait en ouvrir une autre à Paris, mais finalement c’est à Madison Avenue à New York, en janvier 2014 que QELA loue 6 230 pieds carrés au 680 Madison Avenue. Le prix moyen est à cet endroit 2 000 dollars le pied soit la bagatelle de 12 millions de dollars l’année. Ce ne sont pas les quelques sacs qu’elle a vendu qui pourront payer même un mois de loyer, sans compter le personnel. Devant l’échec avéré, QELA se résout à essayer de sous louer ses locaux en attendant la fin du bail. Décidemment le Qatar n’est pas le bienvenu aux US, chacun se rappelle l’échec cinglant d’Al Jazeera America qui a cessé d’émettre depuis fin avril 2016.
Troisième sujet plus complexe, Qatar Airways. De nombreux spécialistes s’interrogent sur la fuite en avant de cette société qatarienne du transport aérien qui enfle à la vitesse d’une grenouille. Même si les derniers résultats économiques sont favorables, notamment en raison de la baisse des hydrocarbures, ces prises de participations et ses investissements pour la mise en place de nouvelles lignes se font souvent par la voie de l’endettement. Un pari risqué car en cas de difficultés le Qatar ne pourra pas secourir sa société phare sans accorder encore plus de crédits au propos tenus par les concurrents de Qatar Airways. L’insistance à vouloir se battre face aux compagnies américaines pourrait être fatale à la compagnie aérienne, les américains ayant l’art de trouver la faille juridique pour plumer les sociétés étrangères, Volkswagen vient d’en faire les frais.
Et que dire de certains qatariens haut placés qui s’embarquent dans des mésaventures économiques faisant confiance à des « incapables » ? Nous avons relaté récemment l’affaire des eaux de Sails. Le tribunal de commerce de Roanne, dans le département de la Loire en France, a accordé mercredi 20 juillet 2016, à la société SAQR Qatar SA, ayant son siège en Suisse, un sursis de huit semaines afin de remettre à flot, l’entreprise d’embouteillage d’eau minérale Domaine de Sail-les-Bains, acquise en 2010. Apparemment 13 millions pour rien…
Globalement le Qatar s’endette rapidement à des taux d’intérêts très bas et espérant une remontée des cours des hydrocarbures, les inconnues se développent et s’ajoutent, combien de temps encore les grandes agences de notations maintiendront leur confiance aux dirigeants du pays et de ses grandes sociétés ?