Etre une rebelle, dans un pays wahhabite comme le Qatar implique, de faire attention à chacun de ses propos et gestes, Scheikha Moza épouse de l’ancien émir Hamad et mère de l’actuel émir, n’a jamais été « une soumise ».
Elle a de qui tenir
Christian Chesnot et Georges Malbrunot racontent dans leur livre « Qatar Les secrets du coffre-fort» : « À la fin des années 1960, la famille de la cheikha a été expulsée du Qatar, plusieurs de ses membres – dont son père – ayant participé à un mouvement de contestation en faveur d’une meilleure redistribution du pouvoir. Les Misnad ont alors vécu au Koweït puis en Égypte, où les idéaux progressistes du nationalisme arabe étaient en vogue.
— N’oubliez pas que sa famille était acquise aux thèses de ce nationalisme, souligne l’opposant syrien Haytham Manna, qui a rencontré Moza à plusieurs reprises. Cela explique certains de ses combats en faveur des femmes et de l’éducation »
En 2014, lorsque les japonais revendiquent l’organisation de la Coupe 2022 en lieu et place du Qatar dans la tourmente, elle part au Japon et quelques jours plus tard les dirigeants du football japonais indiquent qu’il y a eu incompréhension et qu’ils soutiennent le Qatar pour l’organisation de la Coupe 2022.
Etre sous les feux des projecteurs attire les regards des journalistes surtout lorsque Scheikha Moza est la présidente de la puissante Qatar Foundation. Sous la plume de Jamie Dettmer un article intitulé « Thedailybeast», nous interpelle, sur les prédicateurs qui s’expriment dans la mosquée situé sur le campus d’Education City, haut lieu du savoir qatarien. Pour le moins, le journaliste est étonné de voir des prédicateurs de cet acabit, connus pour être « des prêcheurs de la haine ». Il s’interroge sur la volonté réelle, d’une si haute autorité au Qatar, comme Scheikha Moza, qui laisse dire et faire, s’affichant parfois avec ces « personnages » ciblés par le journaliste.
Une activiste sociale ?
Dans une très longue interview accordée à la journaliste Roula Khalaf du Nouvel économiste – Financial Times, Scheikha Moza revient sur son passé et explique son combat. Etre une rebelle, dans un pays wahhabite comme le Qatar implique, de faire attention à chacun de ses propos et gestes, Scheikha Moza épouse de l’ancien émir Hamad et mère de l’actuel émir, n’a jamais été « une soumise ». Elle croit dans l’être humain éduqué et a espoir qu’avec le temps le Qatar pourra accorder encore plus de place à la femme qatarienne, modifier les droits de l’homme, faire évoluer le droit du travail…
Activiste sociale au temps de son mari l’émir Hamad, certainement, car celui-ci la protégeait, mais est-ce encore le cas aujourd’hui ?
Cette marche en avant qu’elle imagine pour son pays pourrait bien être contrariée par son propre fils, l’émir actuel qui tout en bénéficiant des réseaux de son père a du mal à imposer une vision moderne du Qatar et cède du terrain aux « religieux qatariens » et quelques familles conservatrices. Si l’émir Hamad avait sa Scheikha Moza pour avoir la vision « féministe et moderne » du Qatar, l’émir Tamim pour l’instant n’a pas la même chance. Rien ne prouve d’ailleurs que les enfants soient forcément plus modernes que leurs parents. En attendant, il pourra toujours compter sur sa mère, la Scheikha Moza qui ne souhaite pas particulièrement partir en « retraite politique forcée » comme l’ancien émir Hamad. Elle vient de le montrer récemment en acceptant la place d’ambassadeur au Vatican.