Environ 3000 travailleurs Nord-Coréens ne reçoivent que 10 % de leur salaire le reste va à l’état. Le Qatar est au courant mais indique qu’à ce jour il n’y a pas de plaintes de la part de ces salariés donc il continue à exploiter sans vergogne ces travailleurs forcés. L’information vient du « The Guardian » qui ne lâche pas le Qatar et dénonce des méfaits qui vont encore salir l’image du Qatar.
Jusqu’où ira le Qatar dans l’exploitation des travailleurs
Après 20 mois de travail assidu pour comprendre le Qatar je ne cesse de m’étonner de la bêtise de certains de ses responsables qui par cupidité jettent l’opprobre sur le Qatar. Ce pays veut gagner en prestige international en investissant dans des domaines comme l’éducation, le sport ou encore le tourisme. Or, taclé à propos de l’exploitation des migrants sur son sol, il avait annoncé une modification du droit du travail permettant de tirer vers le haut le paiement des salaires, les conditions de travail et les des droits de l’homme en général notamment par une sortie du territoire plus aisée.
Six mois plus tard rien de nouveau à l’horizon, pire le media The Guardian livre une information qui est des plus inquiétante, puisque environ 3000 travailleurs nord-coréens ne toucheraient, une fois arrivé chez eux, que 10 % de leur salaire le reste servant à financer l’état. Et pendant toute la période sur place au Qatar ils mendieraient pour survivre.
Il est urgentissime pour le Qatar que si cette information s’avère totalement fondée la situation de ces travailleurs assimilés à du travail forcé cesse immédiatement et qu’ils redeviennent des migrants touchant intégralement leur salaire. Si de telles situations venaient à perdurer malgré les efforts fait par le Qatar pour améliorer son image celle-ci se dégraderait encore. Toutes les campagnes de communication y compris avec des joueurs de football de prestige et reconnus mondialement ne peuvent effacer des situations aussi dramatiques.
Bonjour,
je pense que votre lecture manque d’une compréhension des sociétés du Golfe, et en particulier du Qatar, et des évolutions qui s’y déroulent.
1. Contrairement a ce que vous laissez entendre dans vos articles, l’Emir ne fait pas ce qu’il veut dans le pays. Il doit réunir un certain consensus auprès des grandes familles qatariennes (Al-Thani, Al-Attiyah, Al-Mohannadi, etc.), et désormais au sein de la société qatarienne de façon plus large. Ces tensions ou discussions ne sont peut-être publies dans les journaux, mais sont discutes dans les nombreux majlis qatariens. L’histoire qatarienne montre que les coups d’Etats sont possibles (1995: arrivée au pouvoir de Sheikh Hamad qui déposé son père, qui avait lui-même déposé son prédécesseur).
2. Il est important de noter qu’officiellement, il s’agit de l’Etat du Qatar et non pas de l’Emirat du Qatar. L’argent des hydrocarbures revient a l’Etat qui joue un énorme rôle de redistribution (97% des Qatariens actifs travaillent dans la fonction publique, le système du Kefala leur permet de garder le contrôle du secteur prive, et est donc ultra bénéfique économiquement et socialement pour les citoyens qatariens dans leur ensemble). Il y a bien entendu une ponction importante de la famille royale avec certaines prébendes, mais parmi les grandes fortunes qatariennes, on retrouve aussi de nombreux non-Al-Thani qui ont profite du développement du commerce: Alfardan, Al Mana, Darwish, Al Hitmi, etc. Certains Al-Thani non proches du sommet sont plus influents en terme de business: Faisal Bin Qassim Al-Thani par exemple.
2. Si depuis l’émergence de Sheikh Hamad en 1995, le sommet de l’Etat est très ‘progressiste’ en investissant dans l’éducation, la santé, le sport, les infrastructures et vise a moyen-long terme un meilleur futur pour les citoyens qatariens, cela ne veut pas dire que l’ensemble de la société comprend les changements programmes ou les soutiennent entièrement. Le sommet de l’Etat va ce genre de challenges (coupe du monde) comme un objectif commun qui peut fédérer le soutien de la population pour atteindre des objectifs beaucoup plus larges en tant que nation: éducation, mobilisation des femmes sur le marche du travail, sante (sport> lutte contre l’obésité et le diabète), préparation de l’après pétrole. Si le sommet de l’Etat est bien conscient de ces enjeux, le reste de la population n’en prend vraiment conscience lorsque leur quotidien est affecte.
En gros, le ‘Qatarien moyen’ comme on dirait en France sont contents d’avoir la coupe du monde, mais ne sont pas forcement favorables a un changement de leur mode de vie et de leur contrôle sur la société qui tourne autour du système du Kefala. Et pour le convaincre, l’Emir ne peut pas les prendre de front, mais faire progressivement convaincre sa propre société.
Il est de notoriété publique a Doha que les familles (a la maison) et business (au travail) qatariens s’opposent vent debout contre cette reforme car elles devront complètement revoir leur mode de vie aussi bien a la maison (maids, drivers) qu’au travail (general manager, comptables qui font tout le boulot a leur place). Pour simplifier, la population active qatarienne est compose a 90% d’expatriés qui occupent toutes les fonctions: des plus basses au plus hautes….Ne cherchez pas de Qatariens sur les chantiers de la coupe du monde, il n’y en a quasiment pas, même les équipes d’inspections du ministère du travail ne sont pas composes de Qatariens. Ce sont des expatries qui ‘exploitent’ et ‘surveillent’ d’autres expatries. Les Qatariens ont pu laisser prospérer ce système car le système de Kefala leur permet de garder la main sur les deux seules choses qu’ils contrôlent dans leur pays et économie: le visa de sortie, et une majorité des parts des business au Qatar. Laisser disparaître le système du kefala va avoir d’énormes retombées sur la vie quotidienne des citoyens qataris: augmentation du turn over, augmentation des salaires pour les petites mains, augmentation des arnaques, et surtout ils vont devoir aller vraiment bosser et pour une grande partie d’entre eux, la coupe du monde ou autres événements n’en vaut pas la peine.