De la béatitude de nombreux politiques aux excès d’intérêts particuliers, comment passer du Qatar un danger pour la France à une relation « normale ».
Les entreprises françaises se renforcent au Qatar
La relation entre la France et le Qatar n’est pas nouvelle, elle s’améliore chaque fois qu’une de nos entreprises remporte un contrat et se détériore chaque fois qu’un de nos concitoyens n’est pas respecté au Qatar. Le 6 octobre 2013 j’écrivais « le Qatar un danger pour la France », un article sans concessions qui découlait de 6 mois d’observations de ce pays. Sept mois plus tard, quelques évolutions montrent que les relations pourraient s’améliorer entre les deux pays si chacun y mettait un peu du sien.
Hier la presse économique annonçait que Systra le groupe spécialisé dans l’ingénierie des infrastructures de transport avait remporté un contrat de 170 millions d’euros « pour le management de projet et la supervision de la réalisation » de la phase 1 du métro de Doha, au Qatar. Il y a quelques jours Vinci renforçait sa présence au Qatar avec un contrat de 850 millions pour construire une autoroute. Peu avant Le ministre de la défense, Le Drian, confirmait une commande d’hélicoptères et de ravitailleurs pour environ 2,4 milliards de dollars. Ceci n’est que la face visible de l’iceberg. De nombreuses sociétés françaises tirent leur épingle du jeu au Qatar. Nous recevons régulièrement des demandes, de la part d’entreprises françaises souvent petites et moyennes, pour établir des contacts avec des interlocuteurs qataris.
Le fameux dossier des « Rafales » s’il venait avant l’été à aboutir cela permettrait d’un seul coup de faire un bond substantiel en matière de relations économiques entre le Qatar et la France. Là aussi en quelques mois les données ont changé. Nous alertions sur le manque d’intérêt d’investir des sommes énormes sur un armement qui ne servirait à rien puisqu’il y avait le parapluie américain et que le Qatar ne disposait pas d’armée en propre.
L’émir Tamim en quelques mois vient de mettre en place un service national qui devrait déboucher sur une armée où la présence qatarienne serait importante. Et de plus en plus de voix commencent à douter de l’efficacité du parapluie américain notamment face aux pressions saoudiennes. Du coup l’achat de moyens de défense pour le Qatar devient vital.
Des problèmes importants demeurent
Lorsque le procureur général du Qatar, al-Marri, administrateur au Lycée Voltaire et au Lycée Bonaparte à Doha vient de se mêler des manuels d’histoire dans ces deux lycées et participe à la chasse aux proviseurs cela ne peut pas arranger nos relations. Or le même al-Marri vient, avec l’ambassadeur de la France au Qatar, promouvoir l’enseignement du français au Bin Hamad Jassim Independent School for Boys. Tout n’est pas définitivement perdu, il faut constater ce type de progrès tout en restant vigilant. Le Qatar est un pays musulman wahhabite qui interdit souvent la mixité. Les qataris doivent diriger leurs propres écoles, cela n’empêche à aucun moment que les professeurs français interviennent pour faire leur travail mais dans ce type de pays ce n’est pas aux français de diriger les collèges, il y a forcément contradiction avec nos valeurs.
Autre problème important, au mois d’octobre 2013, quatre français étaient retenus contre leur gré au Qatar. A ce jour il en reste un, Jean Pierre Marongiu. A plusieurs reprises on a essayé de m’expliquer qu’un sponsor d’une entreprise qui détient 51 % des actions à parfaitement le droit de vider les comptes. Certes, mais après avoir payé les fournisseurs et remboursé à celui qui détient les 49 % sa part. Dans le cas Marongiu, la justice qatarie ainsi que l’ambassade française n’ont pas fait leur travail, bien au contraire. Il est totalement inacceptable que Jean Pierre Marongiu reste en prison alors que celui qui a mis l’entreprise en difficulté soit libre. Marongiu doit être libéré et doit revenir en France.
D’autres difficultés comme le système du Kafala, le manque de droits d’expression libre, une attitude ambiguë avec des groupes terroristes, aucune pratique législative, le site web de l’ambassade du Qatar en France laissé à l’abandon. etc … compliquent les relations. De la béatitude de nombreux politiques, dénoncée par le présentateur Denisot, aux excès d’intérêts particuliers, comment passer du Qatar un danger pour la France à une relation « normale ». L’unique voie est apprendre à se respecter mutuellement.