La réforme, la seule possibilité sérieuse de survivre pour le Qatar.
Se rapprocher des valeurs internationales
Depuis quelques semaines l’escalade entre l’Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unis et Bahreïn contre le Qatar montre à quel point l’arrêt des reformes au Qatar l’entraine inexorablement vers un passé qui pourrait être fatal pour lui.
Lorsque l’émir Hamad il y a quelques années annonça la mise en place d’un processus conduisant à des élections législatives « crédibles » il savait qu’il fallait faire la différence avec l’Arabie saoudite. Il tenait là le sujet qui allait montrer la différence. Il se doutait qu’en se rapprochant des valeurs internationales il aurait en cas d’agression par l’Arabie saoudite le soutien de la communauté internationale. En s’appuyant sur les frères musulmans « seule » entité religieuse ayant un projet politique, en les finançant, il a expérimenté en temps réel la possibilité pour une religion « sunnite » de s’ouvrir à la politique pour diriger un pays. Le constat est loin d’être satisfaisant puisque cette tentative aujourd’hui n’a pas donné les résultats escomptés. Le projet politique des frères musulmans travaillé sans sens critique s’est heurté à la volonté de quelques-uns au sein de la Confrérie de s’approprier le pouvoir plutôt que le partager, l’intérêt particulier de quelques-uns a primé sur un projet d’intérêt général. Est-ce que cet échec sonne la fin de l’initiative politique des frères musulmans, surement pas.
C’est bien ce qui empêche de dormir l’Arabie saoudite ayant compris que cette « essai » politique pourrait après réflexion se reproduire avec cette fois-ci un peu plus de succès. Ce qu’il faut regretter c’est le blocage du processus politique au sein même du Qatar. C’est un élément qui a joué fortement contre les frères musulmans puisque l’Arabie saoudite à juste raison a indiqué que le Qatar prônait ailleurs ce qu’il n’était pas capable de faire lui-même. L’Arabie saoudite a tout fait notamment en Egypte pour que cette malheureuse expérience politique soit un échec. Préférant tirer tout le Moyen Orient et le Golfe en particulier vers un passé qui a fait ses preuves, sans démocratie, de pouvoir absolu, avec quelques « ouvertures » vérifiées dans le temps.
Il faut accélérer la marche en avant vers un essai politique
L’émir Tamim, ayant bientôt 34 ans, doit reprendre ce processus politique associant les citoyens de son pays au projet global qui va bien au-delà de 2022 ou de 2030.
L’émir Hamad son père en mettant en place il y a près de 20 ans la chaîne Al Jazeera, ou faisant de l’éducation nationale un élan pour sa nation a montré sa capacité à aller de l’avant. C’est lui qui a permis, profitant des querelles familiales des princes saoudiens, aux frères musulmans de prendre part au jeu politique, allant du Nord Afrique au Moyen Orient. L’expérience de la Tunisie montre l’adaptation possible de la Confrérie pour rester dans ce jeu politique.
L’émir Tamim doit reprendre le cours de l’histoire, un instant suspendu, et s’ouvrir dans la sérénité à des élections législatives qui de toute manière sont, somme toute, plus une expérience de maturité qu’un danger pour son pouvoir. Comment peut-on donner la connaissance à un pays, l’encourager à la communication et ne pas avoir « confiance » en lui.
Non seulement l’émir Tamim ne doit arrêter son financement aux « frères musulmans » mais il doit participer à la réflexion pour que la religion s’ouvre à la politique. Plus tard, il le sait il y aura séparation de l’église et de l’état dans le respect de chacune des parties. Il sait pour avoir étudié notamment l’histoire européenne le « temps que tout cela a pris ». Arrêter le cours de l’histoire dans son pays qui doit être un modèle d’ouverture politique, social et religieux, c’est se priver de la « seule » chance de survie. Comment peut-il imaginer à 34 ans pouvoir supporter que son pays soit en vie par la « seule » volonté américaine. S’il veut être Tamim « Le Grand » et marquer l’histoire de son pays du Golfe et au-delà c’est le moment d’avoir du courage politique ou alors s’apprêter à vire comme ses ancêtres sous la tente, car c’est bien là que l’Arabie saoudite veut le conduire lui et son peuple.