Si le discours est ambigu en politique étrangère, en économie le Qatar a une communication en constante amélioration. L’article du Gulf Times Times – Inflation pressures in Qatar ‘unlikely’ to fall – le démontre. Ce qu’il faut retenir : le Qatar est toujours aussi dépendant des ressources gazières est n’est pas à l’abri d’un dérapage inflationniste ne serait-il qu’un tableau éphémère et beau que vent emportera ?
L’économie du Qatar un problème de ressources et d’équilibre
Plusieurs organismes internationaux dont le FMI produisent des documents de suivi de l’économie qatarie ce qui nous permet, observateurs de ce pays, d’y voir un peu plus clair. Dans son discours de demain l’émir Tamim est attendu entre autres sur le volet économique. La présentation souvent rapide du Qatar comme le pays le plus riche au monde est parfaitement erronée puisque on confond les ressources moyennes par habitant et le PIB global. Or si on examine le PIB global le Qatar reste un petit pays au niveau international. Ce qui fait sa force est le cash dont il dispose au moment où beaucoup de pays en manquent. Il est évalué à fin septembre 2013 à 143 milliard de dollars. Ce qu’il faut constater et la communication régulière d’informations économiques recoupées par des institutions et organismes internationaux. Pour être souvent critique envers le Qatar, force est de constater que le ministère de l’économie et du développement produit une communication économique en constante amélioration.
La difficulté pour ce pays réside dans ces ressources qui sont issues à plus de 60 % par le secteur gazier et ses dérivés. L’exploitation des gaz de schistes malgré la polémique qu’elle engendre vient peser sur les cours mondiaux. Lorsque la vieille Europe trouvera moyen d’exploiter cette ressource sans trop de dégâts écologique cela compliquera encore plus les cours du gaz au niveau mondial. En outre l’incertitude des relations et négociations avec l’Iran peut aussi influencer l’exploitation et la distribution du gaz. Tout cela pour dire que le miracle économique qatari repose sur des ressources à risques.
L’équilibre à trouver pour le Qatar passe par une accélération de la mise à niveau des infrastructures lui permettant de générer de nouvelles ressources. Le retard pris résulte de mauvais choix de l’émir Hamad qui avait favorisé des aventures internationales au détriment de son propre pays. Pour rattraper ce retard et booster l’envie des qataris, il s’est servi de la coupe du monde 2022. Loin d’imaginer qu’une fois sous les feux des projecteurs le monde entier ferait pression pour que les règles en droit du travail et en matière économique soient celles qui sont pratiquées en moyenne au niveau mondial. Pour le 4-5 prochaines années le Qatar aura besoin de main d’œuvre peu qualifiée pour le bâtiment et travaux public mais aussi d’artisans et petites PME. Au-delà de cette période, les travailleurs non qualifiés seront renvoyés pour recruter d’autres personnels à niveau plus importants. Dans le secteur financier, en développement, le recrutement portera sur prés de 250 000 personnels. Les jeunes qataris pourront absorber au plus 10 % de ces emplois. Le Qatar va demeurer pour longtemps un grand pourvoyeur d’emplois pour la planète entière. Car si aujourd’hui l’essentiel des emplois peu qualifiés proviennent de l’Inde, Népal, Bengladesh, Philippines… demain les emplois de haut niveau seront proposés à tous.
L’équilibre économique passe par les créations de nouvelles ressources
Etre moins dépendant du gaz et de ses dérivés est la tache essentielle des dirigeants du Qatar, l’émir et son premier ministre en tête. Le politologue Karim Sader dans un article récent montre une facette de ce premier ministre qui laisse présager un comportement moins excessif que le précédent à la même place. « … l’émir s’est entouré d’une équipe de cadres rigoureux et loyaux. À l’instar du nouveau Premier ministre et ministre de l’Intérieur Abdallah Ben Nasser al-Thani. Dénué de toute ambition politique et économique, ce dernier représente en effet une sorte d’antithèse de l’ancien Premier ministre, le cheikh Hamad ben Jassem, qui incarnait à la fois la puissance diplomatique et financière du pays. La « success story » du Qatar, marquée par une croissance économique spectaculaire, avait généré un phénomène de corruption et de clientélisme que le nouvel émir entend éradiquer. »
Ces nouvelles ressources comme la finance, le tourisme, les activités autour du sport, de la culture, de la santé… sont du secteur tertiaire elles vont représenter à terme le passage obligatoire pour diminuer la part du gaz dans l’économie. Le secteur primaire avec l’agriculture en tenant compte de l’approvisionnement de l’eau qui finira par être un casse tête, restera marginal mais contribue à une sécurité alimentaire nécessaire. On peut noter l’investissement dans l’élevage et la reproduction de chevaux à forte valeur ajoutée.
Le chaînon manquant demeure le secteur secondaire, hors gaz, qui reste à développer encore plus. L’exemple de la construction de bateaux de prestiges montre qu’il est possible de créer à partir d’un héritage culturel une activité industrielle qui vient conforter les nouvelles ressources. Demain cela pourrait être de l’assemblage d’avions ou d’hélicoptères….
Le point faible du Qatar à ce jour est la gestion des ressources humaines aussi bien qataries qu’expatriés. On peut souhaiter que le miracle économique se transforme en une solide économie multi – secteurs. Mais le Qatar doit impérativement admettre qu’il est urgent de donner à l’humain la place centrale qu’il mérite. L’émir Tamim devrait méditer ceci « Lors des fêtes, lors des cérémonies religieuses ou sacrées, chez les indiens du Sud Ouest des États-Unis, le « médecine‑man », peint sur le sable des dessins symboliques et complexes. Il réalise ainsi un tableau éphémère et beau, un support symbolique que le vent effacera comme il efface tout… »