La Coupe du monde de football en hiver au lieu de l’été, ainsi que des soupçons d’ingérence dans son attribution, les conditions de travail des expatriés, l’affaire des 4 français retenus contre leur gré, les promesses non tenues concernant l’évolution du droit du travail au Qatar…Tout cela se télescope et met le Qatar en danger.
Le Qatar rentre dans l’œil du cyclone
Un ensemble d’affaires qui se déroulent simultanément peut mettre en difficulté le Qatar bien au-delà de la Coupe du monde de football.
Depuis le premier jour de l’attribution de la coupe du monde de foot 2022 au Qatar, plusieurs personnalités et médias ont exprimé d’abord leur surprise et ensuite leurs doutes. L’affaire semblait se tasser lorsque le président de la FIFA M. BLATTER créait un choc en mettant en place « une nouvelle commission pour examiner cette attribution au Qatar ». Le comité exécutif de la Fédération internationale de football (FIFA), qui se tient aujourd’hui 3 octobre et demain à Zurich devrait sans doute reporter toute décision concernant la modification du calendrier en hiver. Or, le fait de ne rien décider laisse en suspens l’avenir de cette coupe du monde et porte préjudice au Qatar pour qui une bonne fois pour toutes, il serait bon de savoir si oui ou non ils garderont cette compétition internationale.
La récente intervention du « The Guardian » dénonçant un nombre de morts impressionnant en quelques semaines a obligé le Qatar à se justifier. Les propos tenus par un de ses dirigeants n’ont pas été à la hauteur de l’enjeu. Au point qu’aujourd’hui le Qatar fait appel à un cabinet d’avocat international pour éclaircir cette histoire. L’accusation d’esclavagisme moderne qui est reprise depuis des mois par des joueurs de foot ou des organisations syndicales internationales ne peut pas être prise à la légère. Si de tels actes s’avéraient exacts même avec des nuances, cela serait « gravissime » pour le Qatar. The Guardian continue son enquête sur les conditions de travail mettant en cause l’intégrité physique et morale des travailleurs expatriés souvent les plus faibles. Ce média dénonce au passage une chaîne complète d’exploitation de ces travailleurs qui souvent ne maitrisent ni le contrat signé ni la langue du pays d’accueil et qui paient des sommes importantes pour accéder à leurs emplois sommes qui font l’objet de remboursements sur de nombreux mois.
L’absence de publication régulière du nombre de travailleurs accidentés, morts ou blessés pouvant être vérifiée est dommageable pour le Qatar, cela mettrait fin à toute polémique. Le Qatar en ne donnant pas ces chiffres crée lui même le doute. Bien évidemment le fait de dire « c’est l’affaire des sous traitants » cela est totalement inacceptable. C’est bien sur le sol Qatari que ces accidents ont lieu. L’autre propos tout aussi navrant est de dire qu’ils ne sont pas morts sur les lieux de travail et donc ne rentrent pas dans les statistiques. Ce qui peut permettre de rétablir un minimum de crédibilité est bien de jouer « la transparence » même si c’est douloureux mais montrer les progrès accomplis pour arriver au « zéro accident » comme le soulignait un responsable politique du Royaume Uni.
Une réaction rapide s’impose pour le Qatar
Pour ne pas être pris par les vents aspirants du cyclone, le Qatar doit réagir et ne plus fuir.
Les promesses faites en matière de droits des travailleurs expatriés ne peuvent pas être considérées réglées avec la Charte des travailleurs. Le système du « kafala » ou sponsor, reste de l’esclavage aboli, ne peut plus durer dans un monde international où le Qatar a trouvé une place. Le simple fait de dire si on vous prend vos documents vous n’avez qu’à saisir la justice est irraisonnable. Les pressions sur l’expatrié qui arrive, ne permettent pas l’équilibre du rapport de force. Les autorités du Qatar sont parfaitement conscientes de la réalité et qu’il est quasi impossible de s’en référer à la justice. Il faut une loi abolissant ce système et introduisant le contrat de travail tel que la communauté internationale le pratique. Nous savons parfaitement les réticences d’une partie de la population du Qatar contre cette abolition du système du « kafala » et la position des autres pays de la région qui à quelques rares exceptions pratiquent le même droit ancestral. Mais diriger un pays demande aussi quelque fois de pousser certaines réformes.
Nous appelons depuis des semaines à un déminage de certaines situations qui portent un grand préjudice au Qatar. L’affaire des 4 français retenus contre leur gré est un exemple de l’incapacité des autorités à gérer des affaires qui peuvent être réglées par la justice sans que ces personnes deviennent des otages. Les élections municipales arrivant en France dans les semaines à venir, on peut s’attendre aux pires dérapages sur ce type de sujet. Ce ne sont pas les quelques distributions de « prix » par l’ambassadeur du Qatar en France qui vont améliorer l’image désastreuse du Qatar.
Ce qui est grave c’est l’entêtement des autorités connaissant parfaitement les dossiers et laissant pourrir des affaires. C’est une fuite devant les responsabilités qui ont des conséquences incalculables.
La récente affaire des bas salaires de certaines professions montre à quel point cet entêtement est préjudiciable au Qatar. On fait parler un organisme international pour dire qu’en moyenne les salaires ont augmenté plus que l’inflation. Là encore, les autorités du Qatar connaissent parfaitement la vérité des salaires de ceux qui ont du mal à vivre au quotidien, bien loin de l’eldorado qu’ils espéraient. Au lieu de prêter attention à ces populations, on « joue » avec les chiffres et on laisse dans une « souffrance terrible ces travailleurs » qui n’arrivent plus à vivre dignement.
Il est temps pour les autorités Qatari de commencer à clore quelques dossiers car laisser s’agglomérer le mécontentement conduit inéluctablement à la catastrophe.